Le guide de l'égarement

TEST DE TERRAIN : ÉTÉ 2014

Le guide
pour se perdre

Photographie d'Adrian Marcoux et mots de Ross Measures

Chaque voyage devrait être rempli d'inconnu et d'un peu de devinettes. Prenez ceci comme un rappel amical à décoller et à sortir.

Notre plan était simple : Nous voulions faire l'expérience d'un voyage en VTT qui consistait à sortir de chez soi, à se perdre et à faire ce qu'il y avait à faire. Nous nous étions tous habitués à des sentiers familiers et à des parcs à vélos parfaitement entretenus. Et généralement, même lorsque nous empruntons de nouveaux sentiers, nous sommes accompagnés par des locaux qui nous empêchent de nous égarer et nous indiquent souvent les meilleures lignes.

L'objectif était cependant de trouver une aventure à l'ancienne sur un terrain accidenté dans un endroit totalement inconnu.

Il s'agissait d'utiliser nos VTT pour nous rendre d'un point A à un point B en un temps limité et avec un minimum de soutien. Mauvais temps, mauvaises directions, corps meurtris et vélos abîmés - rien de tout cela n'allait nous arrêter.

En fin de compte, malgré la souffrance, la pluie et le froid, malgré les minutes et les heures d'incertitude, nous avons vécu bien plus que ce que nous avions prévu. Et nous en sommes tous un peu plus riches.

24 juin 2014

Nous ne sommes pas tout à fait sûrs de ce qui nous attend aujourd'hui, même au petit déjeuner nous n'avons pas complètement assimilé la carte et les instructions. Tout ce dont nous sommes sûrs, c'est que d'ici demain soir, nous vivrons dans notre sac à dos. En regardant la carte, le rifugio où nous logeons ce soir est loin d'ici, donc je suppose que nous aurons quelques navettes entre les deux.

Le seul conseil que notre guide Ash nous a donné hier soir était de ne pas nous approcher des chiens de montagne des Pyrénées qui gardent les moutons dans cette région. Aussi, lorsque Lyle a été attaqué ce matin, tout le monde a soudain pris l'avertissement d'Ash beaucoup plus au sérieux. Lyle est secoué, mais il va bien. Sa trousse est abîmée. Espérons que nous n'en rencontrerons pas sur la piste.

Deux minutes après le début de la randonnée, Lyle est au sol. Sa patte de dérailleur est cassée. Il passe une excellente matinée.

Nous réparons son vélo et continuons, mais après un mauvais virage, nous remontons le sentier et nous nous demandons comment lire la carte.

Nous sommes tombés sur une maison en ruine, complètement étranglée par des millions de lianes. Je n'ai jamais rien vu de tel - elle doit être ancienne. Une longue descente nous a obligés à faire une randonnée à vélo de 10 minutes, sur l'épaule, pour sortir du ravin. C'était très difficile sous une chaleur de plus de 90 degrés. Il y a eu un virage en surplomb au-dessus de Breil-sur Roya qui m'a surpris. J'ai survécu. Tyler m'a donné l'impression que c'était facile.

Nous sommes venus ici pour nous perdre, mais j'espère que nous ne sommes perdus que dans la théorie, pas dans la réalité.

Lorsque notre chauffeur s'est arrêté pour vérifier sa carte, tout le monde s'est précipité sur le prochain Instagram. Loin en dessous de nous se trouvaient les interminables lacets qui menaient au Col de Tende. Au lieu d'emprunter cette route, nous avons traversé sous la montagne dans un tunnel étroit à une voie, puis nous sommes montés au col par le côté italien, qui permettait aux véhicules d'accéder à la crête. Après une heure de route, c'est là que nous sommes sortis. Nous avons été déposés dans un monstrueux château situé au bord de la montagne.

À Fort Pēpin, nous avons traversé un banc de neige exposé, qui s'étendait sur au moins 200 pieds. Un faux pas et un glissement de 1 000 pieds s'ensuivait. Après la chance qu'avait eue Lyle plus tôt dans la journée, tous les regards étaient tournés vers sa sécurité.

En haut de la route de crête à la frontière de la Ligurie, nous avons réalisé que nous étions à 9 kilomètres de notre trajet de 4 kilomètres et que nous étions loin de notre destination. La vue nous a détournés de la réalité de notre situation. Et c'est là que le soleil a disparu.

Je ne suis pas du genre à paniquer, mais j'ai commencé à faire un inventaire mental de tout ce qui se trouvait dans mon sac au cas où nous serions obligés de passer la nuit dans les Alpes.

25 juin 2014

Je n'arrive pas à croire comment la nuit dernière s'est déroulée. Nous avons continué à avancer dans la neige jusqu'à ce que la route redescende. Nous l'avons suivie jusqu'à la crête au-dessus du rifugio, où Tyler est tombé sur Eizo, l'aubergiste, qui était prêt pour un sauvetage à minuit. Je ne saurais dire s'il était surpris, soulagé ou en colère. Quoi qu'il en soit, il nous a préparé un risotto extraordinaire.

Nous avons découvert que le chauffeur de notre navette nous avait déposés à près de 10 kilomètres de l'endroit où il était censé nous déposer. Nous en avons rajouté en prenant un mauvais virage... ou deux. Cela ne me dérange pas ; nous avons vécu une expérience incroyable, même si nous étions perdus.

Eizo aide Tyler à traduire les instructions sur notre carte. Elles semblent faciles à suivre, n'est-ce pas ? Le reste d'entre nous enfile son équipement humide tout en buvant des bols de café pour le petit-déjeuner. Oui, des bols de café. Bienvenue en Italie.

Nous sortons du rifugio et empruntons directement la route militaire qui longe la frontière franco-italienne.

Du sommet, nous voyons la route que nous avons empruntée depuis les forts jusqu'aux montagnes. Cela semble si loin.

Nous avions trois options pour notre itinéraire de l'après-midi vers le Rifugio Franco Allavena, et après notre expérience du premier jour, nous avons choisi la plus rapide. C'est la première fois que nous arrivons dans le temps suggéré. Plus nous nous rapprochons du rifugio, plus le sentier devient rocailleux, et le brouillard se transforme en pluie fine. C'est la première fois que nous voyons un temps menaçant.

Ramon, l'aubergiste, était agréable et le Rifugio était grand mais vide de clients.

La douche de trois minutes a été une montagne russe de chaud et de froid. Il nous a servi des linguines, du faisan, de la salade et des pommes frites. De grands Morettis pour tout le monde

26 juin 2014

Après deux jours de départs tardifs, nous nous rendons compte qu'il n'y a eu aucune suggestion quant à l'heure à laquelle nous devrions commencer nos randonnées chaque jour. Aujourd'hui, nous commençons tôt, peut-être à 9 heures. Dehors, le temps est nuageux, sans pluie, mais le tonnerre au loin est inquiétant. La route d'aujourd'hui semble être la plus longue que nous ayons empruntée jusqu'à présent. J'ai hâte de retourner sur le terrain, la conduite d'hier était tellement différente de tout ce que j'ai connu sur mon vélo de montagne.

Partout où nous allons, nous passons devant une histoire contre nature - il y a des châteaux en ruine et des infrastructures militaires partout. Il est étrange de penser à tout ce que cette région a vécu au cours des deux derniers millénaires. Sans les guerres mondiales, la plupart des routes et des sentiers dont nous parlons aujourd'hui n'existeraient pas. Tout le monde dévore le Nutella et le pain - un petit déjeuner copieux pour des randonnées copieuses.

Après deux jours de travail intense, tout le monde commençait à avoir les cuisses et les mollets endoloris. La route de retour était composée de 45 minutes de montée solide, en gravier, jusqu'à la crête supérieure que nous allions suivre pendant une grande partie de la journée.

D'après les indications, c'est le parcours qui nous exposerait le plus, car nous parcourons des crêtes en forme de couteau. Les indications nous mettent en garde contre les "puits de mine" noirs qui se trouvent sur le bord du sentier. Ils sont apparemment sans fond.

Nous avons retraversé la France. C'est là que l'exposition a commencé - et la pluie aussi. Elle s'est abattue sur nous alors que nous montions le long de la ligne de crête.

Nous ne nous sommes même pas arrêtés pour jeter des pierres dans les puits de mine. Nous avons juste continué à avancer...

Finalement, à l'ombre du Mont Torrage, nous avons trouvé un surplomb. C'est l'heure du déjeuner. Un groupe d'Italiens en sueur et buvant du vin nous a rejoints sous le surplomb. Ils n'étaient pas préparés pour le temps, mais j'étais jaloux de leur vin.

Nous savions alors que nous cherchions le repère 437, et on nous a dit qu'il ne s'y trouvait peut-être plus. Nous avons donc passé une bonne heure à terroriser les vaches, à rouler dans leur merde et, bien sûr, à abîmer notre bouée de sauvetage trempée, la carte.

Ce faisant, nous sommes tombés sur un bataillon situé au sommet d'une crête de couteaux. Je ne peux même pas m'imaginer m'asseoir là-haut pendant la guerre, tellement c'était exposé. Nous sommes revenus un peu sur nos pas et avons retrouvé notre sentier.

Des falaises vertigineuses en haut et en bas. Nous avons chuté de près de 2 700 pieds en un rien de temps. Le sentier était implacablement raide ; nous étions constamment sur les freins, mais le café de Fanghetto se rapprochait de minute en minute.

Douze heures sur une selle très mouillée, 4 100 pieds de dénivelé et 25 miles, mais nous n'avions pas encore terminé. Au café, nous avons reçu nos prochaines instructions.

Alors que le soleil disparaissait, nous nous sommes enfoncés dans le sentier sombre. Contrairement aux sentiers que nous avons parcourus cette semaine, celui-ci est vieux de plusieurs mois, et non de plusieurs siècles. Il y avait de la terre glaise, beaucoup de terre glaise. Nous avons dû plisser les yeux pour voir où nous allions pendant près de 20 minutes avant de rouler dans le lit d'un ruisseau.

Deux choses nous attendaient au bord du ruisseau : Des cendres et un million de lucioles.

Ce soir, nous allons camper au sommet de la montagne au-dessus de Sospel, nous allons faire un feu de camp, devant lequel nous pourrons, je l'espère, faire sécher nos chaussures - il se peut que je commence à avoir le pied de tranchée à ce stade.

27 juin 2014

La nuit dernière a été surréaliste, car nous avons dormi à côté d'un monstrueux rempart. Au-dessous de nous, les lumières de Sospel, où Ash nous avait invités à dîner chez lui, apparaissaient. Nous avons fait un feu de camp rugissant et j'ai empilé mon équipement trempé aussi près que possible sans qu'il ne tombe dans les flammes.

Mes chaussures et ma peau de chamois sont sèches, mes chaussettes et mes gants sont frais et, apparemment, le petit-déjeuner de ce matin sera celui de l'hôtel anglais de Sospel - saucisses, œufs, bacon, jambon, haricots, toasts et Wi-Fi. Je prévois trois portions de chaque.

Le sentier que nous empruntons ce matin sort du camping et descend directement jusqu'au restaurant. Plus tard dans l'après-midi, nous prévoyons de descendre jusqu'à la Méditerranée. Il n'y a rien de mieux que cela.

Nous avons grimpé jusqu'à la descente finale, où Ash nous a rejoints. En chemin, nous nous sommes fait un nouvel ami : un chien de montagne des Pyrénées qui avait décidé qu'il aimait Ty et nous suivait. Lyle n'était pas impressionné.

Cette descente a peut-être été la plus rocailleuse du voyage. Mes mains sont très douloureuses au moment où j'écris ces lignes. Et elle a été longue, vraiment longue. Alors que nous étions au soleil, le ciel était nuageux en dessous de nous, obscurcissant notre vue sur la Med à des milliers de mètres en contrebas.

Vers le bas du sentier, nous avons traversé un manoir abandonné sur la colline. La vue depuis le balcon était incroyable. Il est insensé que cette maison n'ait pas été réutilisée ou restaurée.

À ce moment-là, même si nous avions l'impression d'être proches de la mer, nous étions encore très haut.